Quels sont les motifs de divorce au Québec?

La Loi sur le divorce est une loi fédérale qui s’applique au Canada dont la version actuelle est en vigueur depuis février 1986. En effet, la Constitution canadienne exige que le Parlement établisse les conditions du mariage de même que celles du divorce, afin de créer une uniformité dans toutes les provinces et les territoires du pays. Dans chaque province, le divorce et ses répercussions relèvent de la juridiction d’un tribunal compétent.

Au Québec, c’est la Cour supérieure qui traite les cas de divorce, et toutes les questions connexes, y compris la garde, la pension alimentaire pour enfants, la pension alimentaire pour époux, les droits d’accès et le partage des biens. La province de Québec est divisée en districts judiciaires (Montréal, Longueuil, Laval, Joliette, St-Jérôme, etc.). Chacun d’entre eux a sa propre Cour supérieure.

Vous pouvez intenter des procédures de divorce devant la Cour supérieure du district judiciaire dans lequel vous ou votre époux résidez habituellement. Il existe par ailleurs des règles spécifiques pour déterminer la « résidence habituelle » d’un époux ou d’un enfant.

La Loi sur le divorce prévoit que la rupture du mariage est le motif de divorce. Il y a trois types particuliers de rupture du mariage :

  1. Vous êtes séparés depuis plus d’un an et il n’y a aucun espoir de réconciliation (sans reprise de la cohabitation de plus de 90 jours). Il s’agit du motif le plus souvent invoqué pour le divorce, parce qu’il est « sans faute ». Ni vous, ni votre époux ne devez expliquer pourquoi vous ne cohabitez plus. Il suffit que vous viviez séparément durant une période de 12 mois et qu’il n’y ait aucun espoir de reprise de la vie commune.

La réconciliation est tout de même possible au cours de cette période : si vous vivez ensemble depuis plus de 90 jours, et que vous vous séparez de nouveau, la période de 12 mois doit être comptée à partir de la date de la « nouvelle » séparation. Toutefois, si votre tentative de réconciliation a duré 90 jours ou moins, il n’y a pas d’interruption dans le décompte de la période de 12 mois.

Certains couples se séparent, mais vivent encore sous le même toit. C’est le cas, par exemple, lorsque les limitations financières d’un des époux l’empêchent de louer un appartement. Il est plus difficile de prouver que vous avez « vécu séparément tout en étant sous le même toit », mais les juges sont prêts à entendre vos arguments dans la mesure où la « séparation » est sérieuse : plus de relations sexuelles, plus de sorties ensemble, les repas ne sont plus pris ensemble, et ainsi de suite. Il doit être clair que vous ne faites plus de vie commune, mais que vous vivez comme deux adultes indépendants, sans davantage de contacts que des colocataires n’en auraient.

  1. Un des époux a commis l’adultère. Malgré la croyance populaire, vous n’avez pas à assigner l’amant(e) de votre époux au tribunal pour prouver l’adultère. Dans la plupart des cas, l’époux infidèle finit par admettre l’adultère, ce qui constitue une preuve suffisante. Admettre l’adultère n’a pas de conséquence, puisque, d’une part, la Loi sur le divorce ne prévoit pas de répercussions négatives à un aveu d’adultère, et d’autre part, le jugement de divorce lui-même ne mentionne pas le motif de divorce. L’admission de l’adultère n’entraîne donc pas de honte ou de stigmatisation.

Autrement, il faudra faire une preuve prépondérante pour convaincre le juge que votre époux a bien commis l’adultère et que le mariage est rompu. Cette preuve peut être faite, notamment, en fournissant des reçus de motel ou des factures téléphoniques montrant des appels répétés à un autre partenaire, ou encore en démontrant que l’époux qui commet présumément l’adultère s’est inexplicablement absenté de la maison durant de longues périodes. Ces témoignages peuvent être émotionnels; c’est pourquoi les audiences en cas de divorce sont tenues à huis clos devant un seul juge.

Il ne doit y avoir ni collusion ni pardon sur les motifs de divorce. Ainsi, il est impossible de prétendre que l’autre époux a commis l’adultère alors que ce n’est pas le cas dans le seul but d’accélérer le processus du divorce (collusion). Il est également impossible d’invoquer l’adultère comme motif de divorce si le pardon a déjà été accordé à l’époux infidèle avant d’entamer des procédures (pardon).

  1. Votre époux a fait preuve de cruauté physique ou mentale envers vous, ce qui fait en sorte que la cohabitation est devenue intolérable. La cruauté physique est un motif élémentaire de divorce : tous les juges s’entendent sur le fait qu’aucun des époux ne doit tolérer ou accepter de la violence conjugale.

La cruauté mentale est, quant à elle, beaucoup plus subjective. Le juge doit considérer deux éléments importants. D’une part, il doit déterminer que votre époux s’est conduit d’une manière que vous trouvez cruelle (par exemple, en criant, en vous insultant, en vous rabaissant devant vos enfants ou toute autre conduite similaire). D’autre part, il doit établir que l’attitude de votre époux a pour conséquence qu’il vous est intolérable de continuer votre mariage (par exemple, vous êtes en dépression, vous avez commencé une thérapie, vous êtes incapable de travailler ou de dormir). Un simple témoignage sur des « divergences inconciliables » ou sur « une distance entre les époux » ne suffit pas pour conclure à la cruauté mentale. Évidemment, comme pour les autres motifs de divorce, lorsque l’époux « fautif » admet ses agissements, il est beaucoup plus facile de procéder au divorce.

En réalité, au moment où le divorce est finalement entendu par le tribunal ou que vous et votre époux en soyez venus à une entente, les débats houleux au sujet des motifs de divorce deviennent dérisoires et il y aura généralement une coopération raisonnable afin de faciliter le processus.

Les tribunaux consacrent rarement plus de 10 ou 15 minutes de l’audition à la question des motifs de divorce. Les juges sont davantage préoccupés par la protection des enfants (garde, droits d’accès, autorité parentale, pension alimentaire pour enfants), par le partage des biens (patrimoine familial, régime matrimonial, prestation compensatoire) et par le soutien financier de l’époux désavantagé (pension alimentaire pour époux et montants forfaitaires).