Goldwater, Dubé a signifié un avis au gouvernement du Québec le 1er mars 2021 annonçant que le cabinet conteste l’absence de cadre juridique entre conjoints de fait pendant leur union et lors d’une séparation. Il est inacceptable, font valoir Me Anne-France Goldwater et Me Marie-Hélène Dubé, que les conjoints de fait au Québec soient privés des droits accordés à tous les autres couples mariés au Canada.
En réponse à ceux qui croient que la solution est de donner des droits seulement à des conjointes de fait qui ont des enfants, Me Goldwater répond ceci: « C’est une réalité qui serait dure à accepter pour certains, car les femmes québécoises valent plus que leur utérus! Il est honteux pour une société qui se dit fière d’être féministe de ne pas reconnaître le statut légal des conjoints de fait avec ou sans enfant. Il est grand temps que l’on mette fin au sexisme systémique une fois pour toutes. »
La cause implique une famille québécoise dont l’union a duré près de trente ans. Le couple a eu quatre enfants. Au fil des décennies, une interdépendance économique s’est développée entre les conjoints. Et, tout comme dans un mariage de même durée, à la fin de l’union, l’inégalité économique entre les conjoints est frappante. « La seule différence entre ce couple et un couple marié est d’être passé par une célébration », martèle Me Goldwater, « ça n’a aucun sens! »
La COVID-19 met en exergue le sexisme systémique
Les conséquences disproportionnées qu’a eu la pandémie pour les femmes a fait couler beaucoup d’encre. La situation est encore plus critique pour celles issues de minorités racisées, qui subissent aussi les inégalités sociales. Les soins aux enfants et les autres responsabilités ménagères reviennent plus souvent à la femme dans les couples hétérosexuels. Selon certaines prévisions, il faudra jusqu’en 2024 pour que les femmes en Amérique du Nord puissent regagner la même place qu’elles avaient avant la pandémie sur le marché du travail.
« Comme mon ami le professeur Alain Roy nous a révélé avec tristesse, l’égalité économique des femmes en a pris un coup pendant la pandémie, et il croit fermement que le gouvernement québécois devrait pallier ce phénomène en accordant des droits aux conjoints de fait. Pourquoi? Parce que les femmes ont généralement la responsabilité principale de la garde et des soins à domicile des parents malades, des parents âgés, des enfants, des petits-enfants… La pandémie nous a appris beaucoup de choses, la plus évidente étant que les femmes continuent, comme toujours, d’être économiquement défavorisées. »
L’égalité, un mythe pour les conjoints de fait au Québec
On croit souvent, à tort, que les deux personnes dans un couple sont égales aux yeux de la loi et dans le système juridique du Québec lors d’une séparation. C’est faux. En ce qui a trait aux conjoints de fait, la femme est extrêmement désavantagée par rapport à une femme mariée et ne bénéficie pas d’un traitement égalitaire, chose qui devrait être assurée par la Charte des droits et libertés de la personne du Québec.
Une des missions dans lesquelles Goldwater, Dubé est engagé depuis 15 ans est de corriger cette inégalité. Dans Eric c. Lola, Me Goldwater et Me Dubé ont accompagné « Lola » jusqu’à la Cour d’appel du Québec afin de souligner les contributions que font les femmes au service de leurs familles, qui va bien au-delà de l’acte d’avoir des enfants. Les gains faits par un ménage en tant qu’unité familiale doivent être divisés de façon plus équitable lorsqu’un couple met fin à son union, afin de refléter avec refléter avec respect et dignité les contributions des deux conjoints à leur union.
« Il est inacceptable qu’à notre époque la Charte québécoise de droits et libertés ne garantisse que l’égalité des sexes dans les mariages et les unions civiles et non dans les unions de fait, un fait que peu de citoyennes réalisent », s’exclame Me Goldwater.
La plupart des enfants québécois se voient refuser leurs droits
La majorité des enfants au Québec sont nés de parents qui ne sont pas mariés légalement. Autrement dit, ces parents sont des « conjoints de fait ». Il est donc inacceptable qu’un nombre limité de familles (familles où les conjoints sont des époux) puisse bénéficier des pensions alimentaires, du patrimoine familial et de la société d’acquêts, qui visent à protéger les membres les plus vulnérables dans nos familles. L’impact de cette différence sur le standard de vie des enfants peut être dramatique.
Résultat: il existe deux ensembles de règles pour deux groupes d’enfants au Québec, la majorité des enfants ayant moins de droits. Ce genre d’injustice ne fait que souligner davantage qu’il n’est pas nécessaire de distinguer entre les conjoints avec ou sans enfants lorsqu’on divise les avoirs d’une famille.
De plus, les pensions alimentaires pour enfants sont beaucoup plus basses au Québec qu’ailleurs au Canada. Peu de Québécois réalisent un résultat regrettable: parce que le Québec a choisi d’adopter un barème de pensions alimentaires pour enfants le moins généreux au Canada pour les enfants de conjoints de fait, ce barème a par la suite été appliqué aux enfants des couples mariés privant ainsi presque tous les enfants québécois de l’accès aux barèmes qui leurs assurent le maintien du train de vie avant la séparation.
Le décalage affecte la majorité des enfants québécois, mais l’impact est encore pire pour les parents qui sont conjoints de fait et qui sont donc privés d’autres droits. D’autres droits réservés aux enfants de parents mariés incluent la présomption de paternité, le droit d’utiliser la résidence familiale lorsque le conjoint ayant la garde n’en est pas propriétaire, et le droit du conjoint ayant la garde d’obtenir la moitié de la valeur du patrimoine familial, entre autres.
« Toutes les mères et leurs enfants méritent les mêmes droits devant la Cour et le même niveau de soutien afin de couvrir leurs besoins de base », a ajouté Me Goldwater. « Nous exhortons le gouvernement du Québec de faire le bon choix, et de mettre fin à ce débat d’un trait de plume, sans créer plus de bureaucratie ni de nouvelles inégalités. Pourquoi ne pas adopter la solution la plus simple? Un couple qui cohabite en conjugalité depuis trois ans ou qui a un enfant devrait avoir le même statut qu’un couple marié. Et voilà! Ce serait fait! »
Écouter la conférence de presse de Me Goldwater:
Photo: Jude Beck // Unsplash